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Interview de Romain Colas

Romain Colas est un homme politique Français. Maire de Boussy-Saint-Antoine et député de l’Essonne. Depuis le 6 avril 2016 il est également rapporteur de la loi SAPIN II.

Warning trading : La loi Sapin II vient d’être adoptée par l’Assemblée Nationale. Que contiendra l’article 28 de la loi Sapin II ?

Romain Colas : Au début, la volonté initiale du projet de loi, qui nous a été présenté par le gouvernement, était d’empêcher la publicité sur internet pour les plateformes proposant les produits financiers à très haut risque. L’Assemblée nationale et le Sénat ont élargi l’interdiction à toutes les formes de publicité. Comme avec ce projet on incluait les opérateurs légaux, l’AFCoPSI1 nous a reproché de sanctionner exclusivement les opérateurs qui agissaient légalement sur le territoire national. On a eu à coeur de compléter le dispositif pour pouvoir sanctionner les illégaux, dont ceux qui agissent sous passeport chypriote. Nous avons élargi la loi au sponsoring sportif. C’était incohérent d’interdire la publicité mais de laisser le public exposé à ce type de produit, pendant des heures, lors des matchs de football. Certains opérateurs d’ailleurs, présents sur les maillots des joueurs, ont déjà été condamnés par l’autorité des marchés chypriotes.

WT : Quelle autre critique vous a été donnée par l’AFCoPSI ?

RC : Tout simplement d’abandonner le dispositif, car ils pensent que les gens qui viennent sur leur site sont avertis et qu’ils pratiquent une politique de sélection de leurs investisseurs. Le Parlement, dans son unanimité, leur a répondu que le commerce de ce type de produit était nocif et qu’il fallait l’encadrer au maximum. Ils ont été dans leur rôle en défendant leur business qu’ils pratiquent légalement d’ailleurs. L’attitude de l’AFCoPSI, a été la même que celle des cigarettiers quand on leur parle du paquet neutre. Vraisemblablement, la France sera en capacité d’interdire la commercialisation de ce type de produit à partir de 2018. Actuellement, nous sommes dans l’anticipation pour protéger le particulier des produits qui n’ont aucune utilité économique. Notre travail c’est de définir l’intérêt général et d’encadrer ce qui est nocif.

WT : Quel est le rôle de l’Autorité des Marchés Financiers?

RC : L’AMF est consultée tout simplement, elle n’écrit pas la loi. Quand on légifère sur l’encadrement des marchés financiers, c’est l’AMF qui assure le contrôle. Elle est consultée donc sur ses moyens en interne et l’opportunité des mesures. Lors de nos discussions à l’Assemblée nationale, nous nous sommes référés au règlement général de l’AMF parce qu’elle est en capacité de modifier son règlement en fonction de l’inventivité des marchands de produits financiers toxiques. En effet, on s’aperçoit que dès qu’on interdit un produit, un autre est créé et il ne rentre pas dans les canons de ce qui avait été défini. Aussi, nous avons demandé à l’AMF, en s’inspirant de la procédure de l’ ARJEL2, de demander le blocage des sites illégaux.

WT : Quand cette loi sera-t-elle applicable?

RC: Avant la fin de l’année, la loi pourra être promulguée. Concernant le sponsoring sportif, nous avons trouvé un compromis avec le Sénat pour que l’interdiction rentre en vigueur le 30 juin 2018.

WT : Quelle est, selon vous, l’utilité sociétale de ces produits ?

RC : Aucune. C’est même au contraire des produits nocifs qui peuvent davantage s’apparenter au jeu qu’à de l’investissement. Et incluant aussi de l’addiction. La différence entre le Loto et le Forex avec l’effet de levier, c’est que dans le pire des cas vous perdez ce que vous avez investi. Ici, vous pouvez perdre plus que votre mise. En plus, si cela s’arrête demain il n’y aura aucun impact sur l’économie réelle.

WT : Est-ce que cette loi vient préparer le futur règlement européen MiFID II ?

RC : Ça s’intègrera dans le corpus mais c’est surtout une réponse au constat de l’AMF et du procureur François Molins il y a quelques mois.

WT : Que pensez-vous des produits financiers très risqués comme les trakers, turbots, warrants ?

RC : C’est un peu la même chose mais que peut-on faire légalement en respectant la législation européenne ? Après sur le fond, tous les produits spéculatifs, sans effet sur l’économie réelle, nuisent à l’économie et aux Français. De manière générale, ce ne sont pas des choses que je soutiens.

Merci, Monsieur le rapporteur, d’avoir pris le temps de nous recevoir.

Notes et références :
1. Association française des Courtiers et Prestataires de Services d’Investissement. L’association regroupe les principaux opérateurs de produits dérivés (CFD, Forex, Oprions Binaires), les sociétés IG, FXCM, CMC Markets, XTB et WH SELFINVEST
2.Autorité de Régulation des Jeux en Ligne.

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Nicolas Gaiardo

Nicolas Gaiardo

Nicolas est un journaliste engagé dans la lutte contre les escroqueries financières et passionné du monde de la finance. "Débusqueur" des dernières arnaques astucieuses dans des produits financiers dits atypiques, il se fait un point d'honneur à vous en faire profiter.

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