La retape ou “arnaque dans l’arnaque” est entrée dans une nouvelle ère, celle des “recovery room”, organisées comme des escroqueries à part entières avec site internet dédié et publicité sur les réseaux sociaux et dans la presse. Zoom sur la plus évoluées d’entre elles: Action Refund
Des “recovery room” de plus en plus sophistiquées
La “Retape”, “arnaque dans l’arnaque”, on connait. C’est aussi vieux que les arnaques financières en ligne, comme dans l’arnaque Privilège trading par exemple. Dans les arnaques aux sentiments, la retape prend des formes bien particulières que nous avons décortiqué en novembre dernier, avec de faux policiers trainant sur les réseaux sociaux et dans les commentaires d’articles pour promettre un retour des fonds extorqués.
Ces derniers temps, la retape revient à la mode dans les arnaques au trading et aux faux investissements. Des escrocs reprenne la bonne vieille méthode de l’arnaque dans l’arnaque en la sophistiquant. Auparavant, la formule était appliquée clandestinement. Des employés d’arnaques se faisaient passer pour de faux policiers, faux enquêteurs, faux banquiers ou faux avocats et rappelaient les victimes avec un nouvel angle d’attaque. Les scénarios variaient mais on peut la résumer de cette manière: “nous pouvons vous aider à retrouver votre argent mais il faut pour cela que vous nous donniez… de l’argent”. Logique.

Désormais, ces “arnaques dans l’arnaques” s’inventent une existence publiques et légales. Elles créent un site internet et font de la publicité sur Google et les réseaux sociaux. Les anglais les appellent “recovery room”. Le français “chambre de recouvrement” ne traduit qu’imparfaitement cette expression.
Le gendarme boursier belge en pointe sur les “recovery room”
Elles “demandent toujours à être payés pour leurs services. Les victimes de fraude à l’investissement doivent payer cette rémunération à l’avance, ce qui constitue clairement un indice de recovery room”, écrit le gendarme boursier belge”. Il ajoute que “pour paraître dignes de confiance, ils n’hésitent pas à usurper les coordonnées d’entreprises ou d’instances officielles existantes. De plus, ils demandent parfois aux victimes d’informer personne de leur offre, afin de ne pas entraver l’enquête”.
La plupart de ces sites ont en commun d’être anglophone, même s’ils disposent d’employés francophones et démarchent des francophones. Une offre autonome en français pourrait bien faire son apparition sous peu. La première “recovery room” que nous a avons détecté récemment, c’est 1724-recouvrement.com, sur laquelle nous avons publié un article début mars 2021.
Depuis lors, nous en avons aperçu d’autres, comme Financial Recovery Agency qui se fait aussi appeler plus simplement Recovery-agency. Nous avons publié un article à son sujet. Ce site n’a pas de mentions légales. Il serait domicilié en Ecosse et en Nouvelle Zélande. Le site a été créé en 2019 alors que l’entreprise prétend avoir 8 ans d’existence et une présence dans 50 pays.
L’autorité financière belge a récemment alerté contre cette vague des “recouvert room” en citant plusieurs exemples:
- private-union.com
- traderswatcher.com
- actionrefund.com
- lp.actionrefund.com
- actionrefund-ltd.com
- funds-back.com
- getitbacktome.com, qui fait partie du même groupe que refundbud.com
- myquickrefund.com
- refundbud.com, qui fait partie du même groupe que getitbacktome.com. Les employés de ce site prétendent être installé en Autriche en en Finlande. Un conseiller du nom de “Gabriel Laurent” se démarche des victimes au nom de refundbud.com.
- phoenixsouls.com qui propose par exemple à des victimes de nittrex.co de récupérer leur argent.
Action Refund, l’exemple type de la “recovery room” 2.0
L’offre d’Action Refund est de loin la plus évoluée et permet de mesurer l’investissement qui a été versé dans ces “recovery room” ces dernières semaines. Action Refund dispose d’une page sur le réseau Linkedin avec deux employés. Elle recrute sur les réseaux sociaux et fait de la publicité sur Google en l’associant à des noms de courtiers véreux. Ainsi avons-nous googlé des noms de courtiers associés au mot-clé arnaque. Et nous sommes tombés sur des publicités pour deux de ces recovery room: traderswatch.com et actionrefund.com

Une fois de plus, Google sert de canal de recrutement pour des victimes d’arnaques en laissant passer des publicités pour ce genre de site. La firme américaine avait pourtant fait des efforts ces dernières années, par exemple en interdisant les publicités pour les cryptomonnaies ou en bloquant des sites diffusant de fausses informations.

Une victime d’arnaque nous a raconté avoir cliqué sur l’un de ces liens et être entré en contact avec Action Refund. Elle a été appelée par une conseillère du nom de Kim Brout qui travaille avec un certain Jacob Katz, via l’email mycase@actionrefund.com. Kim lui a présenté Action Refund en lui expliquant que cette société est installée en Israël et qu’elle connaît très bien les arcanes de toutes ces arnaques. Kim envoie même un lien vers le registre israélien des sociétés. A en croire Kim Brout, il serait parfaitement possible de récupérer l’argent de la victime, à condition, évidemment, de payer en avance une forte somme sur un compte situé à l’étranger.

Cette victime d’une arnaque et d’Action Refund était à deux doigts d’accepter la proposition. Elle n’a jamais cessé d’être rappelée et relancée par Action Refund, même ces derniers jours et malgré sa demande clairement exprimées de ne plus être sollicitée. Dans ces échanges avec Kim Brout et une autre personne, cette victime pense avoir parlé à un conseiller ayant un accent belge, très insistant et voulant absolument lancer une discussion en vidéo pour le convaincre. Au téléphone, elle prétendait avoir obtenu le remboursement de “milliers de dossiers pour au moins deux millions d’euros” chez le site de trading par lequel cette victime a été arnaquée. Un harcèlement qui empêche de douter des intentions d’Action Refund et de ces “recovery room”.
La FSMA, le gendarme belge a déjà noté cette sophistication des recovery room quand elle écrit “des victimes entrent en contact avec ces recovery rooms en faisant leurs propres recherches sur Internet ou sur les réseaux sociaux”. Depuis sa création, le site internet d’Action Refund en est déjà au moins à sa deuxième version.